Un petit mot en passant pour signaler à ceux qui ne l'auraient pas remarquée la réédition, au format Omnibus, de la célèbre série kung fu des années 70-80 chez Marvel : Master of Kung Fu, parue en France dans Eclipso puis Thor nouvelle formule en couleurs (l'arrêt d'Arédit privant les lecteurs français d'une bonne trentaine de numéros).
Cette série, devenue mythique pour la qualité des dessins de Gulacy notamment et le run remarquable de Zeck, n'avait jamais été rééditée depuis 30 ans du fait d'un contentieux entre Marvel et les ayant-droits de l'écrivan Sax Rohmer, le personnage principal étant présenté comme le fils du diabolique Doctor Fu Manchu. (Entretemps, Marvel aura essayé de biaiser en renommant Fu Manchu et modifiant les origines du personnage de façon ridicule, sans trouver la bonne alchimie, tant la galerie de personnages secondaires directement ou indirectement inspirée de l'oeuvre de Rohmer est essentielle à la qualité de l'histoire).
On notera le souci d'exhaustivité de cette luxueuse réédition qui, outre une intro par Englehart/Moench, les couvertures, des dessins d'origine et les apparitions du personnage en guest-star, inclut le courrier des lecteurs, ce qui est vraiment sympa. Par contre, on reste avec le principal défaut des Omnibus : l'utilisation d'un papier de qualité mais malheureusement trop blanc, et donc ne rendant pas justice aux couleurs déjà bien flashy des 70's. Quand est-ce que Marvel s'inspirera du papier beige utilisé par DC pour ses fameuses Archive Editions ?
Sur le fond, la relecture des premiers numéros trahit l'âge du titre et le notre aussi : on trouve cela verbeux et les connaissances anatomiques de Starlin et consorts bien approximatives ; l'histoire elle meme tarde à se mettre en place et ce n'est qu'une répétition d'affrontements improbables en toutes circonstances. Mais le meilleur est pour la fin de ce premier volume et pour sa suite : à partir de MOKF 29 attention les yeux. Le duo Mench/Gulacy atteint la pleine maturité de son talent dans des storyboards en trois parties proprement hallucinants par leurs rebondissements, leur violence et leur maitrise du clair obscur. On commence ici avec Mordillo/Brinocki et le volume 2 verra l'apparition du Cat et de Juliet, notamment. La qualité de l'histoire et du dessin ira crescendo jusqu'à l'apothéose du numéro 50. Rarement un comics aura atteint une telle qualité, alliance de dessins magnifiques qui n'ont rien à envier à Steranko et d'une dramaturgie très maitrisée, le titre dans sa meilleure période distillant un savant mélange de soap, de violence kung fu et d'espionnage à la Fleming.
Il est annoncé une édition intégrale en 4 volumes Omnibus.
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